Les baleines oubliées de l’Arctique

27 juin 1996

Aberdeen

Toutes les baleines de l’hémisphère nord, placées sous la responsabilité de la Commission Baleinière Internationale (CBI) sont dépendantes de la qualité de l’Océan Arctique et des mers adjacentes.

Mais l’Arctique est promis à une exploitation effrénée de ses ressources minérales naturelles. L’un des groupes de travail de l’Arctic Environmental Protection Strategy (AEPS) a déclaré dans son rapport de 1996 que : “Les principaux sujets d’inquiétude en Arctique sont: les immersions de déchets radioactifs solides effectuées ces dernières années, l’éventuelle immersion dans l’avenir de déchets radioactifs liquides, l’immersion potentielle des boues de dragage dans le cadre du développement des activités maritimes et les rejets de déchets industriels et domestiques impliqués par l’urbanisation du littoral arctique”.

Une nouvelle illustration de cette explosion industrielle vient d’être donnée par les Russes qui s’apprêtent à accorder des licences de prospection pétrolière dans la mer de Barents et la mer de Kara (Lloyd’s List 10.05.96).
Aussi la réticence ou le refus des pays riverains de l’Arctique à approfondir les recherches sur l’adaptabilité des baleines à ce nouveau contexte et à définir des mesures susceptibles d’y garantir leur pérennité sont ils particulièrement décourageants. D’autant que les populations indigènes dont les pays arctiques disent faire grand cas ont un régime alimentaire basé sur les ressources halieutiques et les mammifères marins. L’argument selon lequel des recherches entreprises ou coordonnées par le Comité Scientifique de la CBI doublonneraient avec les recherches d’autres organismes et particulièrement de l’AEPS ne tient pas la route : il n’y a pas pour le moment de recherches spécifiques sur les baleines arctiques à l’initiative de l’AEPS. D’ailleurs, le Comité Scientifique de la CBI n’a pas reçu de communication scientifique de l’AEPS entre la réunion de Dublin en 1995 et celle d’Aberdeen en 1996. Pourtant, comme le montrent de nombreux témoignages en provenance de laboratoires arctiques recueillis par Robin des Bois, il est urgent d’évaluer les effets des polluants diffusés par les pays industriels de l’hémisphère nord et concentrés en Arctique.

Malheureusement, ce n’est pas le principe de précaution ou le devoir d’anticipation qui prévalent à ce sujet au sein de la CBI, c’est plutôt la loi du silence. Il ressort des propos tenus hier par le responsable de la délégation russe (“Nous nous opposons à toute poursuite des recherches [sur l’Arctique] par le Comité Scientifique de la Commission Baleinière”) que de son point de vue les recherches internationales et pluridisciplinaires sont pratiquement interdites et que les scientifiques russes qui osent ou oseraient dire que certaines baleines dans certaines zones de l’Océan Arctique sont menacées pourraient subir le même sort que l’ex-capitaine Alexandre Nikitine emprisonné pour avoir dans le cadre de recherches officielles contribué à faire l’inventaire des immersions de déchets ou matériaux radioactifs dans la mer de Kara.

Robin des Bois demande à tous les commissionnaires et toutes les ONG qu’ils soient pro-chasse ou anti-chasse de prendre conscience du risque arctique et de faire des propositions dans ce sens pendant l’inter-session et à la prochaine réunion de la CBI à Monaco.

 

 

 

 

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