Madagascar, dynastes satanas, fouette queue ocellé, triton tacheté de Kaiser, coraux.

18 mars 2010

CITES 2010 – Doha
Communiqué n°4

Echos :

Thon rouge : la Commission Internationale pour la Conservation des Thonidés de l’Atlantique n’est pas hostile à l’inscription du thon rouge en annexe 2 et l’Australie, s’y déclare favorable ; à suivre et à confirmer…

Ours polaire : vous pourrez continuez à acheter des tapis et des porte monnaies d’ours blanc. La proposition des Etats-Unis à l’annexe 1 a été rejetée ce matin. L’Union Européenne, principale importatrice, a contribué à ce rejet. Elle a rejoint le Canada, la Norvège, l’Islande. L’ours polaire menacé par les pollutions arctiques, les marées noires, l’écotourisme et le retrait de la banquise passe de plus en plus de temps dans les terres pour rechercher de la nourriture ; il est ainsi de plus en plus exposé aux tirs des chasseurs. L’icône du réchauffement climatique s’est cognée au Qatar dans le mur des marchandages et de l’inertie. L’Union Européenne, toujours aussi bavarde, “ne veut pas isoler le cas de l’ours polaire d’une politique ambitieuse contre le réchauffement climatique”.

Les cyclones successifs sur l’île de Madagascar facilitent l’exploitation illégale de deux espèces d’arbres à bois dur (Dalbergia Baronii, D louvelii) communément appelés bois de rose. Ces essences correspondent à une appellation vernaculaire et commerciale sans lien avec l’Aniba rosaeodora amazonien (voir communiqués de presse CITES n°1 et 3 ). Des négociants profitent des autorisations de ramassage des bois de tempête pour abattre des arbres en infraction avec la réglementation nationale. Des grumes de bois de rose de Madagascar sont expédiées vers la Chine, l’Europe ou les Etats-Unis. Le fabricant de guitares Gibson en a utilisé.

La Chine est gloutonne. A la lisière de la CITES, il faut rappeler que la société chinoise Shandong Longsheng Import and Export Corp a racheté en été 2008 le leader européen du contreplaqué Plysorol dont l’usine principale est à Lisieux en Normandie. Faute de sa matière première, l’okoumé du Gabon, l’usine de Lisieux est en inactivité totale depuis un an. En même temps que le site du Calvados, la compagnie chinoise a racheté les droits d’une concession de 400.000 hectares de forêt vierge où subsiste une biodiversité animale et végétale exceptionnelle. L’okoumé part directement en Chine depuis le port à bois d’Owendo. Le braconnage et la contrebande d’ivoire d’écailles de pangolin et d’autres parures animales sont évidemment difficiles à contrôler.

Madagascar :

L’autorité scientifique de Madagascar sollicite l’inscription de 12 espèces végétales dont les graines, plantules et bonzaï sont vendus par Internet dans le monde entier en tant que pièces ornementales. Ces espèces sont à croissance lente. Les aires de répartitions sont très fragmentées et réduites. Elles sont aussi commercialisées à des fins médicinales et soumises dans leur écosystème aux pressions cumulées des activités humaines. Madagascar est à la fois sinistré par les calamités naturelles, la corruption et les conflits politiques. L’Union Européenne estime que les dossiers scientifiques et les informations sur le commerce international des espèces signalées sont insuffisantes et manquent de cohérence. Malgré l’urgence, et bien que certaines espèces soient à ce point décimées qu’elles mériteraient de passer directement à la case annexe 1, il n’est pas sûr que les propositions de l’Etat de Madagascar soient votées. Après un premier examen hier par les Etats Parties, un groupe de travail a été constitué en vue d’amender ces propositions et de les représenter au cours de cette session. En même temps, le commerce de la flore fait rage sur Internet et il est donc demandé à tous les amateurs de se détourner de l’origine malgache et en particulier des espèces suivantes identifiées par leurs noms latins : Operculicarya decaryi, Operculicarya hyphaenoides, Operculicarya pachypus, Zygosicyos pubescens, Zygosicyos tripartitus, Senna meridionalis, Adenia firingalavensis, Adenia olaboensis, Adenia subsessifolia, Cyphostemma elephantopus, Cyphostemma laza, Cyphostemma montagnacii.

Il convient aussi d’éviter les palmiers Beccariophoenix madagascariensis, et les Dypsis decaryri (ou Neodypsis decaryri) dit palmier triangulaire déjà inscrit à l’annexe 2. Madagascar demandait à ce que leurs graines soient explicitement incluses à l’annexe 2 car pour l’instant leur commerce international était libre de toutes contraintes. Ces propositions d’annotations ont été acceptées hier.

Les dynastes satanas
La Bolivie propose que le dynaste satanas soit protégé par l’annexe 2. Ce scarabée rhinocéros tapi dans les forêts tropicales autour de La Paz et de Cochabamba font l’objet d’une demande importante des collectionneurs. En tête de gondole des scarabées sur Internet, un spécimen de 85 mm de long se vend 200 € chez nature-et-passion.com et autres sites en Chine, en Allemagne, au Japon et en Russie. La collection peut amener à l’extinction.

Le fouette queue Ocellé (Uromastyx ornata) est à lui seul un enjeu diplomatique. Son biotope est le désert du Sinaï et il se répartit entre Israël, l’Arabie Saoudite, le Yémen et l’Egypte (cf communiqué n°2). Israël demande son accession à l’annexe 1. il est déjà en annexe 2. Les sous populations sont de plus en plus fragmentées et isolées en même temps que pénalisées par une sécheresse excessive attribuée aux changements climatiques. L’Egypte est d’accord avec Israël. L’Arabie Saoudite dit qu’il n’y a pas de commerce international et que l’annexe 1 est inutile. Cette appréciation est discutable au regard des offres nombreuses comme sur repticlic.com où Kijiji, un site Internet d’annonce gratuite à Montréal. Plus de 500 spécimens seraient capturés chaque année pour alimenter le marché des nouveaux animaux de compagnie. Faute de soutien suffisant, Israël vient de retirer sa proposition. Le lézard est victime de la politique.

Le triton tacheté de Kaiser (Neurergus kaiseri) est aussi la victime de la mondialisation et de la diversification des animaux domestiques. Espèce protégée en Iran, seul pays de l’aire de répartition, il a été en vente sur le site de la ferme tropicale au prix exceptionnel de 125 euros. Une affaire. Un autre facteur lié à l’aménagement du territoire nuit à l’espèce. La retenue du barrage de Dez dans les Monts Zagros permet à des poissons de coloniser l’un des torrents de l’aire de répartition et de se nourrir des œufs et des larves du triton. L’Iran demande l’inscription à l’annexe 1 de cette espèce.

Les coraux
La Suède, au nom de l’Union Européenne, et les Etats-Unis proposent l’inscription en annexe 2 du corail rouge et du corail rose représentés par 30 espèces. Les prélèvements se pratiquent depuis 200 ans en Méditerranée. Ils ont mené à des éradications locales de bancs ou à la réduction des capacités de reproduction. Certaines espèces recherchées pour la fabrication de bijoux ou d’amulettes attendent d’être centenaires pour atteindre le rendement maximal ; or les coraux sont prélevés dès l’âge de 7-8 ans. La cueillette en scaphandre ou avec des robots est de plus en plus profonde et dégrade des milieux fragiles jusque-là préservés. Les coraux sont des créateurs d’habitat. Les exploitations principales sont dans le Pacifique du Nord Ouest et en Méditerranée occidentale. Dans ce secteur la production déclarée était de 20 tonnes, il y a 10 ans. Elle est aujourd’hui de 40 tonnes grâce à des technologies nouvelles qui permettent de prélever à moins de 600 mètres de profondeur. Dans le dossier de demande d’inscription à l’annexe 2, les pollutions, les destructions des bancs par des engins de pêche et le pillage en l’absence de plan de gestion apparaissent comme les principales sources de régression. Les plongeurs dits de loisir prennent une part active dans le saccage. La livre de corail se vend entre 180 dollars et 700 US dollars. Le principal des prélèvements provient désormais de colonies immatures sans morphologie arborescente. Le Japon est hostile à la proposition.

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