Harare : le piège se referme sur les éléphants

11 juin 1997

Dans le cadre de la 10ème Conférence Plénière de la Convention de Washington (ou CITES, portant sur le commerce international des espèces animales et végétales menacées d’extinction), tout est matériellement organisé pour réduire l’influence des écologistes hostiles à la réouverture du commerce de l’ivoire et, pour arracher aux 2/3 des délégations présentes l’approbation des propositions du Zimbabwe et des pays voisins visant à déclasser l’éléphant d’Afrique de l’annexe I à l’annexe II. La presse d’Harare et la diplomatie du Zimbabwe et de l’Afrique australe se déchaînent pour critiquer les positions des organisations environnementales américaines et européennes et ramener le trafic international de l’ivoire à un simple échange international d’une matière première banale dans les magasins locaux.

Hier en séance plénière, le Président de la Conférence a, pour des raisons d’horaire, grossièrement interrompu le délégué du Sénégal qui, dans ses conclusions, soulignait que le contrôle douanier inter-africain de l’ivoire était, dans l’état actuel des choses, impossible à réaliser et, qu’une reprise partielle du commerce licite risquait de stimuler les activités des braconniers et des contrebandiers dans tous les pays de l’aire de répartition de l’éléphant. Cette crainte est partagée par tous les experts douaniers, y compris français, d’autant que l’ivoire, avec d’autres produits animaux et les pierres précieuses, contribue à financer les achats d’armes et de munitions qui nourrissent la violence en Afrique.

La délégation française illustre les atermoiements et le flottement des pays de l’Union Européenne incapables d’exprimer une position claire et ferme sur le sujet. Elle est dirigée par l’Ambassadeur de France au Zimbabwe et conseillée scientifiquement par un technicien de l’agence du CIRAD au Zimbabwe. Le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement a d’autres objectifs que la pérennité de l’éléphant d’Afrique et n’est pas reconnu pour ses compétences en matière de trafic international de l’ivoire.

L’association Robin des Bois, dont deux représentants participent en tant qu’observateurs aux débats de la Conférence Plénière, prie le Ministère de l’Environnement de donner dans les heures qui viennent des instructions fermes à la délégation française, afin qu’une décision internationale prise sur des bases scientifiques en 1989 et entrée en vigueur en 1990 ne soit pas anéantie. La France doit rejoindre la Zambie, le Kenya, les pays d’Afrique occidentale, la majorité des pays de l’aire de répartition des éléphants d’Afrique, l’Inde et les Etats-Unis dans leur volonté de maintenir l’éléphant en annexe I et d’éviter un probable effondrement de l’espèce consécutif à la reprise du commerce de l’ivoire. L’éléphant doit aussi bénéficier du principe de précaution. Au début de la semaine prochaine à Harare, capitale du Zimbabwe, la France et son nouveau Ministère de l’Environnement devront l’appliquer sur le terrain, au concret et non plus dans l’abstraction des “Sommets de la Terre” et des programmes électoraux.

 

 

 

 

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