Ça bouge en Arctique

22 juil. 2011

Le 7 juillet 2011, un accord sur la frontière maritime entre la Russie et la Norvège est entré en vigueur. Cette nouvelle ligne de démarcation clôt un différend de 44 ans à propos de 175.000 km² dans la mer de Barents et l’océan glacial arctique et ouvre ce qu’il est convenu d’appeler « une zone grise » pour l’exploration des ressources fossiles. Le lendemain de l’entrée en vigueur de cet accord, la Norvège a dépêché sur zone le navire de recherches sismiques Harrier Explorer (OMI 7807380).

Cet accord maritime bilatéral suit un Traité de coopération en matière de recherche et de sauvetage aéronautiques et maritimes dans l’Arctique (voir l’analyse de Robin des Bois sur ce traité, disponible uniquement en anglais). Ce traité est le premier à être signé dans le cadre du Conseil Arctique, le forum intergouvernemental dédié à la gestion de l’Arctique. Il a été signé à Nuuk, au Groenland par tous les pays riverains à savoir le Canada, le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège, la Russie, la Suède et les Etats-Unis d’Amérique. Cet « Accord de Nuuk » concerne exclusivement les opérations de sauvetage en mer des vies humaines. Il constitue un important pas en avant politique dans une période où le trafic maritime au Pôle Nord est en plein développement avec notamment une fréquentation accrue des tankers et des paquebots ; la plupart de ces derniers ne sont pas spécifiquement adaptés à la croisière en milieu polaire. Cependant, l’Accord de Nuuk ne comporte pas de clauses sur la protection de l’Environnement.

A cet égard, le transport des hydrocarbures mais aussi les opérations de prospection soulèvent les principales inquiétudes. Dans ce domaine, l’arrivée sur zone du Harrier Explorer est significative. Ce navire construit en 1979 est arrivé à l’âge de la retraite et du démantèlement. Entre 1998 et 2010, il a été relevé à son bord de nombreuses déficiences techniques dans les différents ports d’escale. Il bat pavillon de Panama, ce qui n’offre pas les meilleures garanties de sécurité. Le Harrier Explorer est la propriété d’un armateur de Dubaï selon la banque de données maritime Equasis et cette combinaison Panama / Emirats Arabes Unis n’offre pas non plus les meilleures garanties d’établissement des responsabilités en cas d’accident.

Pendant la dernière réunion plénière de la Convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est et des eaux adjacentes, tenue à Londres en juin 2011, Robin des Bois a recommandé que compte tenu de la vulnérabilité de l’environnement arctique et de la dite « zone grise », la Norvège suspende les recherches sismiques tant qu’une étude d’impact acoustique ne sera pas mise en œuvre et achevée. Les baleines sont très sensibles aux perturbations acoustiques. Les travaux scientifiques de la Commission Baleinière Internationale ont relevé qu’une seule prospection sismique augmentait le bruit de fond d’une manière significative dans un rayon de 300 km(1). Les désorientations sont nombreuses et peuvent mener à des échouages. Le phénomène peut être aggravé dans le milieu polaire couvert par la banquise et les glaces de mer.

L’intervention de Robin des Bois a été fortement appuyée par l’ensemble des ONG observatrices à OSPAR mais la Norvège s’est abstenue d’y répondre.

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(1) Weilgart, L.S. Dalhousie University, Canada. Managing Noise through Marine Protected Areas around Global Hot Spots http://iwcoffice.org/_documents/sci_com/SC58docs/SC-58-E25.pdf

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