Aujourd’hui quand vous mangez du thon, vous tuez un albatros

16 nov. 2011

Liberté de Thon n°2.
22ème réunion ordinaire de la Commission Internationale pour la Conservation des Thonidés de l’Atlantique et des mers adjacentes (CICTA / ICCAT)

Les oiseaux de mer sont victimes des marées noires et des autres pollutions, des déchets en plastiques, des filets fantômes dérivant dans les océans et des rongeurs invasifs sur le littoral. Ils sont aussi victimes de la pêche au thon. L’une des techniques utilisées, les palangres – des lignes longues de dizaines de kilomètres – pêchent de plus en plus d’oiseaux victimes de la pénurie alimentaire en milieu marin mais aussi de leur sens de l’observation. Ils sont nombreux, albatros et puffins, à s’accrocher aux hameçons en voulant capturer les leurres ou les prises. Les albatros pratiquent ce sport en surface, les puffins tels le puffin à menton blanc (Procellaria aequinoctialis) en plongée.

La flotte thonière tue 10.000 oiseaux par an dans le périmètre de compétence de la CICTA selon son comité scientifique. L’ensemble des thoniers japonais en activité sur l’océan mondial en tuerait 20.000.

Dès 2009, la CICTA a proposé la mise en œuvre de mesures techniques de réduction de la mortalité des oiseaux associée à l’usage des palangres. Ces dispositifs ont fait la preuve de leur efficacité et sont d’ores et déjà applicables dans l’océan austral grâce à la Convention sur la Conservation de la faune et de la flore marine de l’Antarctique. Une réduction spectaculaire des prises non volontaires d’oiseaux est observée autour des îles Sandwich, à l’Est de l’Argentine et de la péninsule antarctique.

Dans le cadre de sa 22ème réunion plénière à Istanbul, la CICTA propose aux Etats membres d’accepter la mise en œuvre de dispositifs d’effarouchement dissuasifs et de submersion rapide des palangres. Eventuellement, pourrait être proposée une obligation de pêcher la nuit, quand les oiseaux sont généralement au repos.

L’aire de répartition des albatros et des puffins se concentre dans l’hémisphère sud. L’application des mesures de protection pourrait être prescrite au-dessous de la latitude 20° Sud, là où sont recherchés les espadons, le thon germon et le thon obèse et où volent des puffins gris (Procellaria cinerea) et des albatros à sourcils noirs (Thalassarche melanophris). Les palangres sont la cause principale du déclin du grand albatros (Diomedea exulans). La dernière estimation évoque 26.000 individus sur une superficie de 64 millions de km², plus de 100 fois plus grande que la France. Dans cette zone, la flotte thonière japonaise mobiliserait 100 millions d’hameçons. Les captures accidentelles d’albatros pourraient menacer d’extinction certaines sous-populations. Ces aménagements techniques de réduction des prises d’oiseaux de mer concerneraient principalement les armements de pêche du Japon, de Taïwan, de la Corée, de l’Espagne et de l’Uruguay.

Si la CICTA ne bouge pas dans le bon sens d’ici la fin de la semaine, quelques unes de ces espèces mythiques pourraient, dans un avenir proche, devenir un mythe.

albatros-2011-RobindesBoisThalassarche melanophris (c) Manzanita Project

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