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Baleines Nagoya Blabla

La Conférence de Nagoya sur la biodiversité s’achève aujourd’hui au Japon alors qu’au mois de novembre la flotte japonaise partira en Antarctique chasser 1.000 baleines. Depuis 1986, date d’entrée en vigueur du moratoire sur la chasse commerciale, le Japon a tué 13.210 baleines au nom de la science, dont près de 10.000 en Antarctique, sanctuaire baleinier depuis 1994. Au vu de l’état de la flotte japonaise, c’est toute la biodiversité Antarctique qui est menacée par une marée noire.

Le navire-usine mère, le Nisshin Maru, ex Chikuzen Maru, a été lancé en 1987. Les plans initiaux en faisaient un chalutier de grande pêche dans les eaux américaines. Il a été précipitamment converti en navire-usine baleinier. Il travaille sur les mers Antarctique sans double coque, ni renforcement contre la glace et avec un seul moteur. En février 2007, alors qu’il naviguait dans la mer de Ross, une explosion s’est produite à bord tuant un membre d’équipage et contraignant le navire à dériver sur l’océan semé d’icebergs. Les autorités néo-zélandaises estiment que cet accident est un des plus graves de l’Océan Austral. Les japonais n’ont pas immédiatement lancé leur SOS. Le Nisshin Maru est aussi un petit pétrolier avec des soutes à hydrocarbures d’une capacité de 2.600 tonnes de fuel.

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Le Nisshin Maru après extinction du feu à bord
© Institute of Cetacean Research.

Le reste de la flotte baleinière japonaise ne remonte pas la moyenne. Les mammifères marins sont repérés en mer par deux navires dont le Kaiko Maru, 36 ans, puis harponnés et remorqués vers le navire-usine par trois autres navires dont le vétéran de la flotte, le Kyo Maru n°1, 39 ans.

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Le Kyo Maru n°1 n’est pas renforcé glace contrairement aux lignes directrices de l’OMI
pour les navires opérant dans les eaux polaires.
© Institute of Cetacean Research.

Tous ces navires battent pavillon japonais. Ce n’était pas le cas de l’Oriental Bluebird, tanker panaméen construit en 1979 et ayant servi de station service pour la flotte japonaise en Antarctique. Fait exceptionnel, Panama a retiré son pavillon à l’Oriental Bluebird en 2008 pour avoir fait du transbordement et du transport de viande de baleines et enfreint les réglementations panaméennes sur la protection des mammifères marins ; l’Oriental Bluebird était un ancien navire congélateur. Devenu depuis lors le Hiyo Maru, il vient de partir à la casse en Chine. Les opérations de transfert d’hydrocarbures de navire à navire (ship-to-ship) génèrent des risques pour l’environnement. Elles doivent faire l’objet d’une étude préalable d’impact en application du protocole sur la protection de l’environnement du Traité de l’Antarctique (article 8 du protocole). Le Japon s’en moque.

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Janvier 2008, le navire-usine japonais Nisshin Maru transfère de la viande de baleine lors de son ravitaillement en carburant par l’Oriental Bluebird dans les eaux antarctiques. Au premier plan, les douanes australiennes © Reuters

Les risques pour l’Antarctique sont renforcés par des conditions de navigation extrêmes et l’isolement de la flotte qui rend les conditions d’intervention et de sauvetage difficiles, tardives ou impossibles. Les seuls incidents sur lesquels les autorités japonaises sont loquaces sont les affrontements avec les militants opposés à la chasse à la baleine. Ces actions de terrains jointes aux actions diplomatiques et juridiques devraient inciter le Japon à laisser ses navires à Shimonoseki en conformité avec le Traité sur l’Antarctique. Le préambule de celui-ci proclame en effet qu’il est de l’intérêt de l’humanité toute entière que l’Antarctique soit à jamais réservée aux seules activités pacifiques et ne devienne ni le théâtre ni l’enjeu de différends internationaux.

Le convoi des 6 navires japonais consommera pendant les 5 mois de la campagne baleinière au moins 5.000 tonnes de fuel et enverra par la même occasion 15.000 t de CO2, du soufre et des suies dans une atmosphère relativement préservée.

Ce voyage au-delà du 60° de latitude Sud devrait être le dernier pour le Nisshin Maru puisque le 1er août 2011, entrera en vigueur l’interdiction de transporter ou d’utiliser des fuels lourds en Antarctique (nouvel amendement à la Convention Marpol de l’OMI). Les japonais doivent maintenant choisir entre renouveler d’urgence et à grand frais leur flotte baleinière vétuste ou tourner la page de cette supercherie scientifique. Robin des Bois espère que les 2 milliards de dollars offerts par le Japon aux pays en voie de développement à l’occasion de Nagoya ne seront pas un argument supplémentaire pour obtenir leurs soutiens lors des votes au sein de la Commission Baleinière Internationale.

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